18 juin 2008

VALSE AVEC BASHIR






J’ai lu à mon retour de Cannes d’un journaliste de France Inter qui animait un blog du festival sur la récente Palme d’or que le film était remarquable mais que la grâce ne l’emportait pas; je ne saurai un peu plus qu'agréer à cette idée. En voilà un justement, celui dont on disait la possibilité d’une double palme et qui était le grand favori de la presse sur la croisette, qui me semble emporté par la fougue de son récit!

Dès la première image Ari Folman donne de l’élan, une esthétique puissante, une manière de manier sa caméra virtuelle, puisqu’il s’agit d’animation, qui donne une force incroyable à chaque image. Ou bien est-ce le traitement du mouvement légèrement dans l’excès qui donne à chaque image une force mystique sans parler de la musique qui vient transcendé le tout. Ari Folman a su maîtriser la technique d’un film d’animation au service entier de son discours, la forme lourde du dessin animé n’a pas pris le pas sur le sens bien au contraire.

Révolutionnaire, vertigineux, diablement poétique, voici les mots qui me viennent à l’esprit en voyant ce film et quelle erreur magistrale de ne pas lui avoir remis la palme d’or, et d’être passé à coté d’une récompense historique : une autofiction ayant pour personnage principale le réalisateur lui même dans un documentaire en animation; voici de quoi il s’agit ici.

Lorsque un ami l’appelle à la rescousse après un cauchemar récurrent en pleine nuit, 26 chiens qui viennent aboyer sous sa fenêtre après une course folle dans la nuit, 26 spectres à l’esprit vengeur. Ari (son double fictionnel) se plonge alors à son tour dans ses souvenirs de la guerre du Liban dans les années 80, il se rend compte qu’il ne s’en souvient plus, juste une image énigmatique et synthétique du conflit lui revient ! En Israël et à travers le monde il part à la recherche de ses anciens amis combattants pour reconstituer le puzzle de sa mémoire qui se renoue petit à petit.

Ainsi le film nous replonge dans la guerre du Liban au gré des témoignages, tout en suivant son enquête pour comprendre cette image énigmatique dont il se souvient. Le discours voulu par le réalisateur est terriblement efficace, montrer la guerre sans glorifier les actes guerriers comme le font tant de film anti-guerre malgré eux. Ici de toutes les séquences guerrières ressort plutôt, du dégout, de l’amertume, de l’absurdité, de l’effroi, une expérience traumatique qui 20 ans après révèlent son ampleur. Aussi complexe qu’un Charlie Kauffman le film prend la forme d’un esprit perdu dans son propre cerveau, aux travers des souvenirs confus du réalisateur, de rêves, de scènes réels, un vrai thrilleur qui nous mènera au dénouement terrible qui expliquera enfin la vision hypnotique lancinante que ses souvenirs lui renvoient.

Brillant de A à Z, une animation prodigieuse, une poésie ravageuse, une image pénétrante et pétaradante, une musique sciante, des couleurs ocres bouleversantes, une narration maligne, un humour percutant au cœur de l’horreur c’est le génie d’Ari Folman, Valse avec Bashir est peut être un chef d’œuvre.

Il y a beaucoup à dire sur ce film, sur le plan politique, sur l’Histoire, le massacre de Sabra et Shatila, le Liban, Israël, l’histoire du film à Cannes, sa production (4 ans de travail), sur la fin du film, sur sa construction mais je vous laisse le soin de lire la presse qui sortira autour du 25 Juin 2008 date de sortie du film pour le découvrir au préalable.

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